1,7 millions d’euros. C’est le prix déboursé par un amateur aux enchères pour s’offrir une bouteille de Macallan 1926, 60 ans d’âge, propulsant une fois de plus la distillerie au sommet du cercle très fermé des whiskies les plus chers au monde. Distillerie de tous les superlatifs, Macallan voit régulièrement les prix de ses bouteilles les plus prestigieuses flirter avec l’indécence sur le marché secondaire. Comment de l’eau, des céréales et quelques décennies peuvent-ils valoir des sommes aussi astronomiques ? Simple whisky pour certains, œuvre d’art liquide pour d’autres, une chose est sûre, la distillerie du Speyside ne laisse personne indifférent…
Le Macallan 1926 Valerio Adami, Saint Graal du collectionneur
Fondée en 1824 à Craigellachie, par un fermier et instituteur du nom d’Alexander Reid, celle que l’on nomme à l’origine Maghellan est reconstruite par James Stuart, successeur de Reid, en 1868. En 1892, Macallan passe entre les mains de l’emblématique Roderick Kemp, ancien propriétaire de Talisker. Les descendants de Kemp, en particulier la famille Shiach, en conservent la propriété jusqu'à la prise de contrôle de la distillerie par Highland Distillers (aujourd'hui Edrington), en 1996.
Le domaine d’Easter Elchies, connue pour être le berceau de Macallan
Depuis l’époque où il n’était équipé que de deux alambics, le site a été constamment amélioré. Cinq nouveaux alambics sont ajoutés en 1954 (deux wash stills, trois spirit stills), puis sept en 1965. Ce processus se poursuit tout au long des années 1970 et le nombre total d'alambics s’élève à vingt-et-un en 1975. Malgré ces évolutions, Macallan tient à conserver le caractère riche et huileux de son new make. Ainsi, même si le nombre d’alambics augmente avec les années, la capacité de ces derniers reste toujours la même (environ 3900 litres). Seules les années d'après-guerre mettent à rude épreuve le style de la distillerie. En effet, en raison de la pénurie de charbon qui découle du conflit, Macallan doit recourir à la tourbe pour sécher son malt. Unique en leur genre, les quelques millésimes datant de cette époque sont aujourd’hui l’objet de toutes les convoitises…
Un Macallan 1946, un des rares millésimes tourbés
Pour une distillerie dont la croissance va de pair avec celle de l’industrie, il convient de rappeler que Macallan est à cette époque destinée, en grande partie, au marché de l’assemblage. Si les années 1950 voient l’arrivée des premières mises en bouteilles de single malt sous licence confiées à des négociants réputés tels que Campbell, Hope and King et Gordon and Macphail, ce n'est qu'au début des années 1980, face au ralentissement du marché, que Macallan, comme beaucoup d’autres distilleries de l’époque, décide de se concentrer sur la catégorie naissante des single malts.
Un rare embouteillage de Campbell, Hope & King
C’est à cette époque que le Macallan « sherry cask » se fait une place chez les amateurs. Pour ces derniers, la couleur, les arômes et le goût des sherry cask whiskies sont rapidement assimilés à la distillerie du Speyside. Si tout est mis en œuvre pour conserver le style du new make, pour ce qui est des fûts de vin de Xérès dans lesquels vieillit le whisky, Macallan s’occupe du problème directement à la source, en devenant l’une des premières distilleries à passer des commandes sur-mesure aux bodegas espagnoles. De la sélection des chênes dans le nord de l’Espagne, en passant par la durée de séchage du bois, du type de tonnelage, ou du type de vin désiré pour l’avinage, la distillerie ne laisse rien au hasard. Difficulté supplémentaire, Macallan n’ayant jamais recours à la coloration artificielle, l’assemblage des fûts doit répondre à un goût mais aussi à une couleur très précise.
Avec l’ouverture d’un complexe ultra moderne équipé de pas moins de trente-six alambics, 2018 voit un nouveau chapitre s’ouvrir dans l’histoire de la distillerie. Une histoire qui, au vu du succès de Macallan, n’en est qu’à ses débuts…
La salles des alambics de la nouvelle distillerie
Jusqu'en 2004, la totalité des single malts est élevée en fût de sherry, la production vieillie en fût de bourbon étant réservée aux assembleurs. Cependant, face à la hausse de la demande des single malts, et à la difficulté de se fournir en fûts de sherry, la distillerie effectue un virage à 180 degrés et lance la gamme Fine Oak, composée de whiskies issus de vieillissement en fûts de sherry et en fûts de bourbon. Cette gamme change radicalement l’identité de Macallan, au grand dam des puristes.
Malgré l’entrée en jeu des fûts de bourbon, les grands amateurs de Macallan peuvent toujours compter sur la distillerie pour embouteiller parmi les plus beaux fûts de xérès disponibles dans ses chais. De la gamme Fine and Rare regroupant des millésimes de 1926 à nos jours, aux Macallan Lalique, dont les écrins rivalisent avec les liqueurs d’exception qu’elles contiennent, en passant par les Red Ribon, et les coffrets Master of Photography, Macallan transcende son statut de simple distillerie et se pose aujourd’hui comme une ambassadrice du luxe à l’écossaise.
La collection des Macallan Lalique
Une chose est sûre, nul ne devrait mourir avant d’avoir goûté à cette légende du whisky !