Ernesto Mainardi Sestante

Ernesto Mainardi commence sa carrière dans les années 1970 en travaillant pour Co. Import, importateur de Macallan en Italie, jusqu’au décès de son propriétaire. Il reprend alors la distribution de Gordon & MacPhail, grâce à sa rencontre avec son directeur George Urquhart, lors d’un long voyage en Écosse en 1975-1976. Il bénéficie par ailleurs de quelques embouteillages exclusifs. Mainardi importe aussi les whiskies embouteillés par George Strachan (Rosebank, Glen Grant, Tamdhu), un commerçant justifiant d’une modeste activité d’embouteilleur indépendant, et, parfois aussi, ceux de certaines distilleries.

 

 

En 1977, Ernesto Mainardi ouvre un bar à Parme, qu’il baptise Il Sestante, d’après l’instrument de navigation à réflexion (sextant en français). Au même titre que les navigateurs se servaient du sextant pour s’orienter et explorer le monde, Mainardi veut que les embouteillages qu’il propose permettent aux amateurs de parcourir l’univers du whisky. Quelques années après l’ouverture du Sestante, Mainardi commence son activité d’embouteilleur indépendant sous le même nom, en sélectionnant, en 1985, deux Bowmore : un 14 ans distillé en 1971 et un 20 ans distillé en 1965, que, selon Mainardi, Ian Morrison aurait qualifié de meilleur Bowmore qu’il ait jamais goûté. D’autres embouteillages de Bowmore par Sestante sont restés dans les mémoires, à commencer par les Crest Label, nommés d’après la forme emblématique de leur étiquette, sorte de blason dont le bord supérieur présente une petite pointe.

 

Les embouteillages Sestante sont connus pour proposer souvent deux versions : l’une, réduite à 40%, et l’autre, brut de fût, réalisées à partir du même fût. Les étiquettes sont souvent colorées, ornées de dessins et chaque distillerie bénéficie de sa propre étiquette. Parmi les sélections de Sestante, Islay occupe une place confortable : les embouteillages de whiskies venus de l’île sont assez nombreux, et souvent de grande qualité : citons les Bowmore déjà mentionnés, des Ardbeg aux étiquettes pastel, des Caol Ila, des Laphroaig décorés d'un voilier et quelques rares, mais très beaux, Port Ellen. La liste des distilleries représentées par Sestante est longue et s’il faut retenir ceux d’autres régions, c’est sans conteste le Glenugie 1967 et le Ledaig 1973, dans leurs versions brutes de fût. 

 

 

Sestante s’est également illustré par ses embouteillages réalisés pour des bars en Italie, dès les années 1990 : Antica Casa Marchesi Spinola à Canelli, Carato, une enoteca de Brescia, le Bar Metro à Milan ou encore l’American Bar Nidaba à Montebelluna. Dans la tradition de Co. Import avec Macallan, Mainardi sort de nombreux embouteillages en carafe en cristal, en collaboration avec Edinburgh Crystal. Ces carafes suscitent toute l’attention des collectionneurs, par leurs nombreuses variations de forme et d’ornementation. Mainardi en aurait vendu environ 3 500 exemplaires. Mentionnons enfin les Brick Label (avec des short cap), dont un remarquable Clynelish 24 ans 1965, et les embouteillages de Cadenhead parmi lesquels, là encore, on citera deux Clynelish d’anthologie : un 23 ans 1966 et un 24 ans, probablement distillé en 1965.

 

 

Au début des années 2000, Mainardi fonde une autre société, Silver Seal, en collaboration avec Douglas Laing pour la sélection des fûts. Les premiers embouteillages sortent en 2001 avec la mention « First Bottling ». Il la revend à Massimo Righi à la fin de la décennie.

Si la qualité de ses sélections est incontestable, Ernesto Mainardi demeure un personnage controversé dans l’univers du whisky en Italie, notamment pour les incohérences pointées sur l’origine des Pluscarden Valley dont il affirme qu’ils viennent de Glenfarclas alors que certaines étiquettes mentionnent Milton Duff. Reste que ses sélections le placent parmi les grands embouteilleurs indépendants de son temps.

 

Glenugie 20 ans 1968 Sestante

59,5%, 75 cl, 1988

Parmi les rares embouteillages de Glenugie, celui-ci est considéré par nombre d’amateurs comme le meilleur. Très marqué par le sherry, on y trouve un rancio de première classe, des notes de café et d’orange amère. La diversité des arômes est hors du commun, le whisky développe des notes de fruits exotiques (ananas, mangue) et médicinales (camphre, eucalyptus), venant donner du relief à l’ensemble. En bouche, le fruité et l’opulence se parent d’épices variées comme la cannelle, la badiane ou le clou de girofle dans un mélange qui évoque le cinq épices chinois. Époustouflant.

 

Ledaig Tobermory 14 ans 1973 Sestante

56,3%, 75 cl, 1987

Cet embouteillage, précédé lui aussi d’une certaine réputation, affirme un caractère marin et une touche fermière qui n’est pas sans rappeler certains whiskies d’Islay ou certains Brora. La tourbe est au premier plan, suivie par des notes anisées, poivrées et médicinales. La légère douceur beurrée et sucrée de ce whisky est contrebalancée par l’acidité d’un citron. L’ensemble est à la fois précis et ample avec une finale où la tourbe s’exprime admirablement.